BIKI comme garant du savoir-être et de la moralité chez les Ekang ou les interdits chez les Ekang
EKI ou BIKI, tiré du radical « Ki » renvoie à la force, à la virilité et à la puissance et se traduit par interdit chez les Ekang ou encore le sacré. Biki (le pluriel) se traduit alors par les interdits chez les Ekang. Pour les Fang (Ekang), Eki est tout acte ou toute chose défendue, défense qui revêt différentes formes à savoir : initiatique, sociopolitique, clanique, familiale et religieux, qui servent de code moral de savoir-vivre et de savoir-faire. Tous les interdits ont pour fondement les rites Melan, Nsis ou So’o, le Mevung et le N’gil, Eki désigne une personne ou une chose marquée d’un caractère sacré dont on interdit le contact ou l’usage.
Les biki sont des règles dont les Fang se sont imposés l’observance en matière de convenances personnelles, de régime matrimonial, de religion, de médecine, de sorcellerie et de moral. Il existe des biki collectifs ; généraux dits de moralité ou de sexe, de classe d’âge, d’association ; les biki personnels, d’état ou accidentels, les biki rituels (société initiatique, pratique rituelle). Ils imposent très souvent l’obligation d’accomplir des actes déterminés. Le but de l’éki semble conférer à son détenteur une certaine puissance, une fascination et la facilité de procréer chez les filles, la richesse, la combativité et l’invulnérabilité chez les hommes.
Les biki se classent en deux catégories qui sont : les biki alimentaires et les biki dit d’action. Ils ont pour fonction de protéger la faune et la flore, assurer la prospérité et le succès d’un mariage, réguler les rapports sexuels et la vie en société. Les biki sont individuels, temporaires, permanents, masculins et féminins, de classes d’âge, ordinaires, les interdits capitaux, les interdits mortels, les interdit totémiques, les interdits de protection, les interdits de grossesse, de maladie et hygiéniques.
La transgression d’un eki chez les Fang révèle du nsem (péché) et entraîne des effets néfastes variés. Il peut s’agir de l’indisponibilité légère à la mort et comporte presque toujours la réprobation sociale. Néanmoins, la transgression d’un eki donne souvent lieu à des rites de purification du transgresseur accompagnés de confession publique et de sacrifices. La formulation de la majorité des eki est liée à la notion d’akam qui renvoie à la notion de protection.
Les biki sont des lois instituées par les ancêtres dans le but d’imposer le respect des savoirs et savoir-faire et de préserver l’harmonie au sein du groupe. Les interdits sont non seulement un code moral, mais également des ressorts cachés de l’esprit Fang qui participent à la formation d’une sorte de caractère et sur des valeurs essentielles qu’ils peuvent promouvoir et défendre.
Malheureusement, avec l’entrée des Fang dans le village planétaire qu’est la mondialisation le contact avec une nouvelle forme d’éducation, l’initiation aux religions importées au détriment des rites initiatiques et religions traditionnelles, la plupart des interdits ne sont plus observés et relèvent désormais de la superstition et de la sorcellerie devenant totalement interdit.
Sveltana Adah Mendome, Rédactrice Savoir-Faire Ekang, Libreville, Gabon